sad mother alone

Je suis une maman quand même

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À toi, dont l’enfant grandit,

Aujourd’hui, tu m’as dit que je ne pouvais pas comprendre. Quand tu as raconté ce que ça te faisait en dedans quand ton enfant réalisait un exploit ou qu’il se faisait mal, tu m’as dit qu’il fallait être mère pour comprendre ce dont tu parlais.

Je n’ai rien laissé paraître, mais en dedans de moi, j’ai senti le sang bouillir dans mes veines. J’ai eu envie de te hurler que je savais de quoi tu parlais parce que moi aussi, je suis une maman. Oui, j’aurais eu envie de te crier par la tête que je suis une maman pour toujours.

Pourtant, je n’ai rien dit. Parce que je n’ai pas eu la force de te contredire, pas l’envie de me justifier. Parce que j’aurais cru, sachant mon histoire, que tu ne m’aurais jamais servi ce genre de commentaires. Parce que j’ai cru qu’entre mères, quand tu as porté un enfant en toi, ce genre de choses-là, tu les comprends.

Mais voilà. Je ne vois pas mon enfant grandir. Il ne fera jamais ses premiers pas, il n’entrera jamais à l’école. Pire encore, il ne m’aura même jamais appelée maman.

Il n’en reste pas moins que je suis une maman. Oui, pour toujours et à jamais, je serai sa maman. Celle qui l’a porté durant neuf mois. Qui l’a senti bouger dans son ventre. Celle qui a choisi ses premiers vêtements.

Je suis celle qui a choisi son prénom, qui a imaginé son avenir. En quelques mois, ma vie s’est transformée comme la tienne et je suis peu à peu devenue une mère, la sienne.

J’ai préparé sa chambre et son arrivée dans notre maison, sa maison. J’ai préparé sa sortie. Je me suis questionnée et assurée qu’il n’aurait ni trop froid, ni trop chaud lorsque le vent toucherait sa petite peau pour la première fois.

Aujourd’hui, tu m’as dit que je ne pouvais pas comprendre. Qu’il fallait être une mère pour pouvoir le faire. J’aurais dû te répondre que je savais très bien ce que ça faisait de se sentir impuissant devant la souffrance de son enfant. Que par le passé, j’ai déjà craint que mon coeur explose de fierté en regardant mon enfant essayer de respirer sans aide.

Il n’y a pas de petits êtres qui courent dans ma maison ni de dessins accrochés sur les murs de mon salon. Je ne cacherai jamais sa première dent dans un tiroir et je ne verrai jamais sa première copine. Mais j’ai son petit bracelet qui me confirme qu’il est bien vrai. J’ai aussi  des marques sur le ventre pour me rappeler qu’il fait partie de moi. Que j’ai été, que je suis, et que je serai toujours sa maman.

Aujourd’hui, tu m’as dit que je ne pouvais pas comprendre. Qu’il fallait être une mère.

J’ai eu envie de te dire que c’est toi qui ne comprends pas.

Être mère, c’est être à jamais transformée. C’est sentir son cœur exploser d’amour pour une personne que tu ne connais même pas. C’est vouloir mourir pour lui permettre de vivre. C’est ne plus être capable d’imaginer sa vie sans lui. C’est vouloir pour lui un avenir meilleur, à sa hauteur. C’est être morte d’inquiétude quand il ne va pas bien et se remettre à respirer quand il va mieux. C’est se battre pour lui, même quand notre propre poids nous semble trop lourd. C’est l’aimer, à la vie, à la mort. C’est savoir qu’on ne retrouvera jamais notre quiétude d’avant, mais ne pas lui en vouloir pour ça.

Et ça, tu vois, je sais c’est quoi.

Mon enfant a un nom et une date de naissance. Sur son enregistrement de naissance, c’est mon nom qui est écrit juste en dessous de « mère ».

À toi qui m’as dit que je ne pouvais pas comprendre parce que je n’étais pas maman, ne répète plus jamais ces mots.

Mes rêves se sont tous évanouis lorsque j’ai perdu mon enfant;  ne me retire pas le privilège d’être à jamais sa maman.

Crédit : Tolikoff Photography/Shutterstock.com

La Collaboratrice dans l'Ombre

La Collaboratrice dans l'Ombre est la couverture utilisée par toutes les collaboratrices de l'équipe qui souhaitent écrire des articles crus et criant d'une vérité sans filtre. Souhaitant exprimer et assumer leurs opinions sans pour autant blesser leur entourage immédiat, elles préfèrent alors utiliser le couvert de l'anonymat.

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1 Comment

  • Bravo, pour votre courage! (En tout plan!)

    Je n’ai pas vécu ce que vous avez vécu.
    Et n’aurai la prétention de dire que je comprends comment l’on peut se sentir dans votre position.

    Mais ce partage, ne peut qu’aider à saisir plus clairement votre réalité !

    Merci d’avoir osé !!
    Bonne poursuite dans vos écrits !!

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