depressed mother

T’es arrivée au boutte de ton rouleau

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Ça y est. Tu l’as atteint aujourd’hui.

Le boutte de ton rouleau.

Pis tu ne comprends pas pourquoi. Qu’est-ce que qui s’est passé de spécial aujourd’hui pour que tu te retrouves avec toute ton rouleau dans les mains pis pu de lousse pantoute pour dérouler plus loin?

Pourtant, t’es heureuse, comme le prouvent si bien tes photos de famille pis ton nom en grosses lettres sur la porte de ton bureau à la job.

Alors veux-tu bien m’expliquer pourquoi t’as le cœur si serré, si souvent? Pourquoi tu caches tes yeux qui se remplissent ben que trop souvent d’eau à tous ceux qui t’entourent?

Tu essayes de prouver quoi à qui, là?

Faut que t’arrêtes de t’entêter à tirer dessus, ce rouleau-là. Parce que tu vas tomber en pleine face, ma belle maman. Pis se relever, c’est dur. Pis long. Pis souffrant.

T’sais, t’es pas arrivée au boutte de ton rouleau rien que dans une journée. Pis si tu ne comprends pas ce qui a pu te mener aussi loin, c’est parce que t’as le nez trop proche du mur en face de toi.

Prends une pause. Retourne-toi. Regarde tout ce qu’il y a de déroulé derrière toi. On n’en voit même pas le bout.

Toutes ces années où il t’a manqué l’équivalent de six jours de sommeil par semaine, voilà ce qui t’a fait voir le boutte de ton rouleau.

Toutes ces fois où tu t’es mis dans la tête d’avoir une maison Spic’n’Span malgré le fait que plusieurs enfants y vivent, voilà ce qui t’a fait voir le boutte de ton rouleau.

Toutes ces fois où tu as dit oui à une sortie quand tu savais très bien que tu étais ben que trop brûlée pour sortir de la maison, voilà ce qui t’a fait voir le boutte de ton rouleau.

Tous ces matins où tu as manqué laisser ta peau et ta santé mentale pendant la routine du matin, voilà ce qui t’a fait voir le boutte de ton rouleau.

Toutes ces heures supplémentaires que tu as accepté de faire pour le soi-disant avancement de ta carrière, avec la culpabilité dans la gorge parce que tu avais l’impression de laisser tes enfants derrière, voilà ce qui t’a fait voir le boutte de ton rouleau.

Toutes ces chicanes avec ton chum parce que tu trouves qu’il n’en fait pas assez dans la maison pis avec les enfants, voilà ce qui t’a fait voir le boutte de ton rouleau.

Tous ces obstinages en règle avec tes enfants à chaque maudite fois que tu leur demandes de faire de quoi pour t’aider, voilà ce qui t’as fait voir le boutte de ton rouleau.

Toutes ces fois où tu as refusé une soirée sans enfants en te disant que c’était pas nécessaire, que toi tu ne les fais pas garder, tes petits, voilà ce qui t’a fait voir le boutte de ton rouleau.

Toutes ces soirées et ces week-ends à trimballer ta marmaille d’un cours à l’autre, à des tournois qui finissent pu de finir pis à trois fêtes d’amis par mois, voilà ce qui t’a fait voir le boutte de ton rouleau.

Toutes ces fois où tu t’es obligée à essayer douze mille nouvelles recettes par semaine en espérant faire le bonheur de tes petits capricieux, voilà ce qui t’a fait voir le boutte de ton rouleau.

Toutes ces fois où tu as tout fait pour tout le monde, où tu as dit oui quand tu pensais non, où tu as dit non quand tu pensais oui, où tu as confondu bonheur et perfection, voilà ce qui t’a réellement amenée au boutte de ton rouleau.

Qu’est ce qu’on fait avec ça, à c’t’heure, que tu vas me dire?

On fait ce qu’on peut. Ce qui veut dire que ce qu’on ne peut pas faire, on le laisse à quelqu’un d’autre. Mais il faut que tu commences par prendre un break pour faire la différence entre les deux.

Tu dois refaire le chemin inverse avec ton maudit rouleau. Je t’avertis, ça ne prendra pas juste cinq minutes. Mais ça se fait.

Tu dois tout d’abord être douce avec toi. Parce que t’sais, t’es fine avec tout le monde, sauf avec toi-même.

Ensuite, pas à pas, tu vas apprendre à être honnête. Arrête de te conter des menteries. Tu n’es pas la femme bionique. Et tu dois comprendre que personne ne te demande de l’être. Accepte tes limites.

Pis demande de l’aide, du temps, des breaks. Délègue, mais pour vrai. Pas le droit de surveiller par en arrière.

Pis braille donc un bon coup, ça fait sortir le méchant. Après tu vas voir plus clair.

Vivre au boutte de son rouleau, c’est pas une vie. Tu n’as pas à rester là.

Il est toujours temps pour toi de changer de direction.

Crédit : Lopolo/Shutterstock.com

Audrey Roy

Super-maman de trois enfants dans la trentaine avancée, directrice en chef de ma famille reconstituée (presque) parfaite, ma vie est une source inépuisable de délires familiaux à écrire. Étant une ex-abonnée de l'organisation extrême, le petit dernier m'aura appris que le lâcher-prise est une valeur sûre pour survivre à mon quotidien. Fière mère indigne, écrire est pour moi un véritable plaisir coupable. Au plaisir de vous faire sourire (et de vous faire sentir moins seules dans vos tourments).

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1 Comment

  • Merci merci merci !
    Pour ce mot si vrai, si réconfortant… ça me touche de voir que d’autres ne comprennent.
    Je suis présentement en réflexion à savoir si j’arrête les compétitions avec mon cheval ( activité que toute la famille pratique) car je me sent débordée de partout et je veux lâcher du leste quelque part mais je ne sais pas où… tout le monde me dit: Ben voyons t’aime ça non?! Oui mais je suis… au bout du rouleau!
    Bref, merci d’avoir écrit cet article!
    Geneviève XX

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