tired mother

Quand tu es à bout de souffle

Ton cadran sonne. C’est le matin, déjà. Ton cœur se serre juste d’entendre cette sonnerie, pourtant douce. C’est que c’est le signe qu’une autre journée commence et tu n’es pas prête.

Tu snoozes quatre fois, repoussant le moment fatidique.

Mais tu dois faire face à cette journée. Tu dois te lever. Tu entends déjà tes enfants jacasser du fond de leurs chambres.

Encore sous les couvertures, tu ouvres enfin tes grands yeux noirs, ma belle maman. Et ils sont remplis de larmes. Tu pleures en silence dans la semi-noirceur enveloppant encore ta chambre.

Il est 5h45 du matin et tu es déjà à bout de souffle.

Avant même de sortir de ton lit, ce matin, tu ne te sens pas en mesure d’affronter cette journée qui commence. Tu as de la difficulté à identifier la cause de ce mal-être qui t’habite soudainement. Tout ce que tu sais, c’est qu’une vague de découragement t’envahit. Ça te submerge. Et tu as l’impression de te noyer dedans.

Pour toi, cette journée ressemble à une montagne dont tu ne vois pas le sommet. Et tu as l’impression que tu ne l’apercevras jamais, ce maudit sommet de tâches à accomplir. Pourtant, il n’y en n’a pas plus qu’à l’habitude. Mais aujourd’hui, la montagne te semble si abrupte, impossible à gravir.

Mais tu dois te lever et essayer. Même si tu as le souffle court.

Tu entames ta routine sur le pilote automatique. Tu accomplis chaque geste sans même y réfléchir. Comme si quelqu’un d’autre vivait cette matinée à ta place. Tu es là. Mais y es-tu vraiment? Tu réussis, tu ne sais pas comment, à rendre les enfants à bon port, prêts pour débuter leur journée à l’école et à la garderie. Ils ne manquent de rien et ne remarquent même pas tes yeux rougis.

Il est 7h30 du matin, et tu es encore à bout de souffle.

Tu dois trouver la force de te rendre au travail. Tu dois trouver la force de sourire et d’être efficace. Mais ce matin, ta force semble s’être perdue en chemin durant la nuit. Tu as beau chercher, elle n’y est plus. Envolée.

Assise dans ta voiture, dans le stationnement du bureau, tu fixes l’immeuble devant toi. Tu dois y entrer. Ta gorge se serre, les larmes reviennent. Tu te sens comme un casse-tête dont on aurait éparpillé les morceaux. Après plusieurs minutes à essayer de remettre tes morceaux en ordre, tu dois y aller. Ils t’attendent, ils te font confiance.

Tu fais ta journée, et personne ne semble s’apercevoir de ton essoufflement. Personne n’entend les pensées qui se trament dans ta tête. Des pensées qui entrevoient déjà l’escalade que sera le retour à la maison. Tu es encore loin d’apercevoir le sommet de ta montagne.

Il est 17h00, et tu es toujours à bout de souffle.

Même si tu fais le chemin inverse de ce matin, les émotions qui t’envahissent sont toujours les mêmes. Tu réfléchis à tout ce qui t’attend pour la soirée, et tu es sur le point de paniquer. Le souper, les devoirs, les bains, la vaisselle, le lavage. Et puis, tu devras peut-être même faire l’amour, il y a si longtemps que tu n’as pas pris le temps. Mais cette activité, qui te semble d’habitude un exutoire pour tes mauvaises journées, te paraît aujourd’hui comme une marche de plus à grimper pour atteindre le satané sommet de cette journée. Une corvée de plus.

À chacune des étapes de cette soirée, tu tentes de contrôler ton souffle court. Tu essaies de respirer pour ne pas éclater en sanglots devant tes enfants, qui n’ont pas à subir l’épuisement de leur mère. Mais lorsque personne ne regarde, tu laisses rouler une larme en pliant ta deuxième brassée. Les vêtements, eux, ne te demanderont pas ce qui ne va pas. Tout le monde au lit, tu t’assois enfin sur le sofa, même pas capable de te concentrer sur les images qui bougent dans ton téléviseur.

Il est 22h00, et tu es au bout de ton souffle.

Mais tu n’oses pas aller te coucher tout de suite. Tu vois bien que ton corps et ta tête te le demandent. Qu’ils veulent tous deux reprendre leur souffle. Mais ton cœur, lui, sait que quand tu t’endormiras, une nouvelle montagne se pointera le bout du nez lorsque tu ouvriras les yeux. Et ton cœur aussi a besoin de repos.

Alors tu prends quelques minutes pour toi, seule, dans le silence. Et ça te fait du bien.

Tu sais, ma belle maman, tu n’es pas seule à gravir des montagnes. Il nous arrive toutes de vivre des journées comme celle-là, où chaque minute nous semble des heures. La plupart du temps, dès le lendemain, la montagne redevient une colline. Parfois, c’est un peu plus long.

Mais crois-moi, ton souffle, il reviendra.

Et tu pourras continuer ta randonnée avec le sourire.

Promis.

Crédit : Africa Studio/Shutterstock.com

Audrey Roy

Super-maman de trois enfants dans la trentaine avancée, directrice en chef de ma famille reconstituée (presque) parfaite, ma vie est une source inépuisable de délires familiaux à écrire. Étant une ex-abonnée de l'organisation extrême, le petit dernier m'aura appris que le lâcher-prise est une valeur sûre pour survivre à mon quotidien. Fière mère indigne, écrire est pour moi un véritable plaisir coupable. Au plaisir de vous faire sourire (et de vous faire sentir moins seules dans vos tourments).

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3 Comments

  • Bonjour, je suis maman au foyer.je pense que ces mots écrit représente bien les maux qui m’envaillisse, le mal être est bien là. Je suis à bout de souffle je cherche chaque l’oxygène l’énergie pour y arriver. J’emmène mais enfants à l’école et je rentre seul à pied avec l’impression de porter des pois à chaque jambe et les jours de pluie c’est pire. Je rentre et je suis lasse je dépose ma canne et enlevé mon manteau après mettre batailler avec mes chaussure. Je peux enfin prendre mon petit déjeuner …. Ou pas. Je debarasse la table et fait la vaisselle tant que j’ai de la force puis je m’ assois pour enfin. Ça y est mon corps est trop douloureux mes muscles me font mal . Tout mon être réclame le dodo. J’ai honte mais je me couche et dort. Je me réveille. Je mange puis j’essaie de ranger un peu. Très vite mon corps dit stop. Alors je vais me me reposer. Je lit pour ne pas cogiter. Puis c’est l’heure d’aller chercher les enfants 15h30 je part à 16h00j’arrive devant la première école essoufflé épuiser. J’enchaîne je vais chercher mon dernier. Ma fille passe en vélo avec sa copine elle me fait signe et part à la maison. J’ai mes deux autre enfants je le concentré pour écouter leur histoire d’école leur joie leur peine. Parfois je ne comprend rien mon cerveau ne suit pas alors gentillement je lur demande répéter. Il le faut je me concentre bien. Puis on arrive enfin ma fille est la elle m’aide à l’enlever mes chaussures je passe au devoir repas et enfin dodo. Mais le sommeil tant attendu fuit parce que je cogite. La honte d’être une maman avec un corps qui fonctionne mal. Et je pleure. Et m’endors avec mes larmes.

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