sad teacher at school

Je suis une prof passionnée qui songe à quitter le navire

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Il y a plusieurs années déjà, j’ai songé à un métier qui viendrait m’allumer au plus profond de moi. Un métier qui aiderait les autres, qui pourrait changer le monde un petit geste à la fois. L’enseignement s’est présenté comme une évidence. Avec mes quelques années d’expérience, la flamme brûle encore ardemment. Elle brûle même plus qu’au premier jour. Et paradoxalement, c’est pourquoi je songe à quitter le navire de l’éducation.

Je veux quitter parce que je n’en peux plus du mépris envers mon travail. Je n’en peux plus de me faire répondre que j’ai juste à quitter si je ne suis pas satisfaite. Je suis tannée de me faire reprocher mes conditions de travail supposément exceptionnelles alors qu’il ne s’agit que du gros bon sens. Vous, les parents, me confiez ce que vous avez de plus précieux au monde : vos enfants. Je ne comprends pas pourquoi il y a autant de mépris envers les enseignants.

Je veux quitter parce que je n’ai pas les outils pour bien faire mon travail. J’ai l’impression d’être une charpentière en train de construire une maison à qui l’employeur dirait qu’il n’y a plus d’outils, mais qu’elle doit s’arranger avec un marteau afin de parvenir à ses fins dans les mêmes délais en faisant un travail de la même qualité que si elle avait tout ce dont elle a besoin à portée de main. J’essaie de faire grandir des petits humains et parfois, ça demande un coup de pouce supplémentaire. Quand on me répond qu’il y a un minimum d’un an d’attente pour un cas d’élève urgent, ça me brise le coeur. Pas parce que ça va me demander de m’adapter, mais parce qu’il a besoin d’aide et je ne peux pas combler son besoin à moi seule.

Je veux quitter parce que je me sens abandonnée. Je ne me sens pas entendue ni par mes patrons, ni par la population en général. Quand je ferme ma porte de classe en fin de journée, je me demande ce que j’aurais pu faire de plus. Je pense à mon élève en difficulté d’apprentissage dont les parents auront de la difficulté à lui faire faire ses leçons. Je pense à mon élève dont le parent a un problème de consommation en espérant qu’il soit en sécurité. Je pense à mon élève qui a des carences affectives en me demandant quoi faire de plus pour qu’il se sente aimé. Je pense à mon élève en attente d’un diagnostic qui doit se sentir démotivé, en espérant qu’il ait le courage de revenir à l’école demain matin.

Je veux quitter parce que je me sens impuissante face à ma vocation. Il me manque trop d’outils, de temps ou de ressources pour faire mon travail convenablement. C’est impossible pour moi de laisser tomber un enfant et j’ai pourtant l’impression que c’est ce que je fais chaque jour bien malgré moi.

Je veux quitter parce que je ne veux plus avoir l’impression d’abandonner mes élèves alors que je donne déjà tout ce que j’ai.

 

Crédit : vectorfusionart/Shutterstock.com

La Collaboratrice dans l'Ombre

La Collaboratrice dans l'Ombre est la couverture utilisée par toutes les collaboratrices de l'équipe qui souhaitent écrire des articles crus et criant d'une vérité sans filtre. Souhaitant exprimer et assumer leurs opinions sans pour autant blesser leur entourage immédiat, elles préfèrent alors utiliser le couvert de l'anonymat.

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12 Comments

  • Ma femme est une institutrice dans une école privée. Elle m’a dit souvent que son travail est un véritable calvaire. Mais ce que je ne comprends pas, je lui ai proposé de trouver un autre boulot (comme télétravail), mais elle a refusé.

  • Tu n’as pas à avoir honte si tu choisis ce choix plusieurs excellents professeurs l’on fait par passion. Je fais l’école maison car je ne crois pas au système d’éducation en place. Je ne me prends pas pour un professeur ni pour la solution parfaite mais un plan B pour un système éducatif qui abandonne les enfants différents et les professeurs. Plein de merveilleux professeurs comme toi offrent du soutien autrement à des gens qui le veulent vraiment. C’est beaucoup plus satisfaisant que le système en place. Je dis souvent que j’ai rien contre l’école mais si elle était séduisante pour mes enfants j’y resterait. Vous jouez au concierge, aux spécialistes, l’informatique a alourdi la charge de travail pour la préparation sous réserve que c’est plus simple (pas d’accord), l’enseignement de l’empathie devrait être un cours de base pour vous aider, … Les solutions sont là les professeurs crient qu’ils se noient et les centres de service et ministre restent sourd ! Il faut plus de sport mais pas avec un programme aussi lourd. La surévaluation des enfants est toxique depuis 1968 des rapports sont publiés sur ce point et on les ignore. J’ai vu des professeurs passionnés pleins d’empathie changer de cap car trop blessés. Gardez votre passion et utilisez-la autrement quelques soit votre choix. Juste essayer de survivre dans un plan invivable pour moi vous avez tout mon respect, vous avez le droit à une qualité de vie. Présentement on lapide l’école maison mais vous savez les parents qui font ce choix c’est simplement pour sauver leur enfant et que cet enfant garde la flamme de l’apprentissage qui s’éteint à l’école. Ce n’est pas votre faute, j’ai eu des professeurs comme vous merveilleux impuissants à m’aider donc j’ai été voir au privé et j’ai trouvé un plan B car je ne veux pas abandonner mes enfants. Prendre un choix différent hors norme est totalement effrayant mais parfois c’est le meilleur choix pour vivre sainement.

    • Bonjour, je suis enseignante et votre message est bouleversant de justesse. Il donne à la fois à réfléchir, mais aussi beaucoup d’espoir. Merci. Votre immense compréhension fait chaud au cœur, vous venez d apporter une pierre supplémentaire à la construction d une reconversion professionnelle pour ma part.

  • Un cri du coeur! J’ai l’Impression que votre texte sont les mot que j’aurais pu écrire il y a plusieurs années déjà; moment où j’ai quitté l’enseignement.
    MERCI d’ouvrir sur votre vulnérabilité et ainsi élever les consciences sur une réalité qui se répète.

  • Chère collègue dans l’ombre, comme je te comprends! Et nous sommes toujours plus scrutés à la loupe quand nous sommes qu’une partie de l’équation. C’est durant le jour que les difficultés/problèmes arrivent. Mais ce n’est que la partie visible du iceberg. Je trouve ça lourd à porter je t’avoue! Comme j’aimerais que la vision des dirigeants et de la société change! ?

  • N’abandonne pas ton navire. C’est ton équipage, ils sont besoin de toi. Tu es leur motivation, le pilier et tu les aimes. Se ne sera pas facile, l’enfant voit ta passion. Courage tu es la pause pour le jeune ayant un parent avec des problèmes de consommation. Tu es l’aide pour l’enfant avec ses problème d’apprentissage. Tu es l’amour pour l’enfant en recherche. En tant moi même parents et PEH. Merci de faire la différence avec ta passion.

  • Je me.retrouve complètement dans votre message…même constat pour moi…je veux/Je vais quitter le navire…même si j aime mon métier. Mais je ne supporte plus d être complice d un capitaine qui abandonne ses matelots, qui leur demande de traverser l atlantique avec juste des rames, et des gens qui nous méprisent trop en pensant qu on est des chanceux sur une croisière…. et des élèves que je ne peux pas aider comme ils en ont vraiment besoin, dans la réalité de la vraie vie, et pas comme dans des textes de bureaucrates.

  • Vous décrivez une réalité vraie.
    Un sentiment que nous ressentons. Il faut le dire, et continuer à venir tous les matins avec le sourire pour les enfants. Ils attendent ça, un sourire.
    Malheureusement, il faut accepter que nous intervenons que 1 an dans la scolarité des élèves. Nous ne sommes pas le seul levier face aux difficultés des élèves. Déjà faisons notre possible pour eux, cela fera avancer malgré tout les choses pour nos élèves.
    C’est un métier merveilleux, qui bouffe notre vie privée. Une fois qu’on l’a compris et subi, à nous de nous adapter, car un système prend du temps pour évoluer.

  • Je te comprends, ce n’est pas une profession évidente, tu te donnes entièrement avec tout ton savoir et tout ton cœur ♥️ et que récoltes tu en retour? Les commissions scolaires devraient être plus présentes pour donner appuie aux professeurs. Ils ont besoin d’être secondé par un groupe fort, un groupe qui n’a pas peur de relever leurs manches et de répondre présent a tout professeur angoissé ? par le manque de compréhension de certains parents et par le manque d’éducation de certains élèves.
    Les enseignants sont là pour faire comprendre les matières à étudier ? et travaillent à ce que les étudiants assimilent plusieurs compétences qui seront importantes dans leur vie et leur travail d’adulte.
    L’éducation en elle-même doit se faire à la maison, cette partie revient aux parents de leur expliquer la politesse, le respect en société, le savoir-vivre, la façon de s’habiller, se nourrir et de s’occuper de la propreté de soi-même et de ses biens.
    Les parents ont deux, trois ou quatre enfants à éduquer, tandis que les professeurs ont de vingt-cinq à trente étudiants à qui ils doivent leur montrer le français, les mathématiques, l’anglais, la géographie, l’histoire et j’en passe……..
    Il me semble que ce n’est pas difficile à comprendre quel est le rôle de chacun dans la société. Merci,

  • Tout est à refaire…..L’enseignement a toujours
    Été considéré comme une VOCATION!
    Les religieux et religieuses consacraient leur vie entière à l’éducation et l’instruction.
    Depuis l’instruction publique ( pouvoir gouvernemental) les priorités ont changé!
    L’éducation et la santé devraient être PRIORITAIRES….

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