woman waiting doctor

Cher très mauvais médecin

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Cher très mauvais médecin,

Je suis une femme exténuée, une maman fatiguée, une employée surmenée, et aujourd’hui, j’ai voulu être aidée. J’ai réalisé, mieux vaut tard que jamais, que je devais m’aider et j’ai franchi le cap de mon orgueil mal placé pour te crier à l’aide. Je me suis présentée dans cette salle d’attente bondée, les yeux rougis et inondés de larmes et j’ai affronté les regards interrogateurs des gens, croyant prendre la meilleure décision pour moi et ma famille.

Et toi, cher très mauvais médecin, tu m’as accueillie avec ton regard plein de reproches et d’incompréhension et j’ai vu dans tes yeux cette impression que je n’étais qu’une petite fille en quête d’attention. J’ai eu beau t’expliquer les épreuves par lesquelles j’étais passée, rien de tout ça n’a semblé t’impressionner. J’ai eu beau te réciter par cœur les peines et sentiments qui me hantent depuis des années, rien de tout ça n’a semblé te toucher. J’ai eu beau m’accuser devant toi de tous les torts que j’ai pu causés, rien de tout ça n’a semblé t’atteindre d’une quelconque façon. J’ai eu beau pleurer en te disant que j’étais fatiguée et que je ne savais plus comment faire pour m’aider, rien de tout ça n’a semblé t’importer.

Toi, cher très mauvais médecin, tu t’es contenté de me répondre que tout ça était de ma faute et de rien d’autre. Que je devrais reprendre le dessus avant de tout perdre. En l’espace de quelques mots, tu as enflammé mon sentiment de culpabilité et renforcé cette impression que j’ai en permanence de déranger ceux que j’aime. Tu as balayé les infimes particules de mon estime que je tente de rapatrier depuis des mois. Tu as remis en doute la véracité de mes dires et estimé que j’avais une personnalité propice aux délires et je suis repartie avec une prescription d’antidépresseurs, un « bonne chance à c’t’heure », et encore plus de peine sur le cœur.

Mais, cher très mauvais médecin, sache que tu étais dans le tort et tu avais devant toi, non pas une petite fille en quête d’attention, mais une conjointe remplie de bonnes intentions. Une maman qui n’a plus la force de faire semblant que tout va bien pour supporter les siens. Une femme forte qui a tout affronté, sans jamais avoir la pensée d’abandonner. Une personne remplie de douceur et de bonté sur qui l’on a toujours pu compter.

Cher très mauvais médecin, une bonne chance pour toi que cette femme forte est toujours cachée là, aux creux de moi, prête à se battre pour avancer et que sa vie n’était pas en danger sans quoi tu aurais sincèrement pu vivre avec le poids d’une culpabilité dont tu ne sembles pas imaginer l’ampleur.

Cher très mauvais médecin, si je peux me permettre un conseil, la prochaine fois que quelqu’un se présentera devant toi en pleurant, fatigué et déprimé, écoute-le, ne minimise pas sa peine et offre-lui la compassion dont il a besoin et pèse tes mots avant de laisser s’abattre sur son coeur et sa vie une pelletée de jugements qu’il ne mérite pas.

Je sais que tes collègues ne te ressemblent pas tous, mais j’ose espérer qu’aujourd’hui, pour devenir un bon médecin, on vous apprend l’essentiel. J’ose espérer qu’aujourd’hui, pour devenir un bon médecin, on vous apprend que la santé mentale est un enjeu majeur et que chaque cas mérite d’être traité avec tout le respect qu’il mérite.

Crédit : Roman Kosolapov/Shutterstock.com

La Collaboratrice dans l'Ombre

La Collaboratrice dans l'Ombre est la couverture utilisée par toutes les collaboratrices de l'équipe qui souhaitent écrire des articles crus et criant d'une vérité sans filtre. Souhaitant exprimer et assumer leurs opinions sans pour autant blesser leur entourage immédiat, elles préfèrent alors utiliser le couvert de l'anonymat.

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6 Comments

  • Je souhaite fortement qu’une plainte sera déposer à l’Ordre Professionnel des médecins. Il n’y a AUCUNE excuse valide qui permet a un professionnel de la santé de banaliser la douleur psychologique d’un patient. JAMAIS!

  • Je l ai vécu en 2016 , mon medecin ne trouvait pas important un arret de travail et je me suis ramassée a l urgence 8 mois apres et suite a ca elle a ete un peu plus humaine ………………..Aujourdhui elle est redevenue la meme depuis que je vais mieux , juste 15 minutes pour parler de mes petits bobos car le plus de patients qu elle voit , le plus d argent qu elle fait , c est pour ca que je songe a changer de medecin mon lien de confiance envers n est pas la . Merci pour votre témoignage , je me sens mloins seule

  • Juste épouvantable comme attitude de
    la part d’un médecin… une histoire semblable m’est déjà arrivée et c’est vrai que ca donne un gros coup dans l’estime de soi… Vous faites bien d’en parler car c’est rassurant de voir qu’on est pas seule à subir cette attitude de m….
    En 2019! Encore tant d’ignorance et surtout de manque d’empathie, c’est désolant…
    Bonne chance et changez de Doc au plus vite si possible…

  • À l’âge de 16/17 ans je suis passée à deux cheveux de faire une tentative de suicide. Je n’ai malheureusement pas trop le temps en ce moment même de composer un long commentaire (plus tard peut-être? pour mieux expliquer mes expériences) mais en résumé le psychiatre qui m’a évalué à l’urgence (ayant été emmenée à l’hôpital par les membres de ma famille) m’a demandé en quoi j’étudiais au Cégep, je lui ai répondu  »art dramatique/théâtre » et il est parti à rire en me disant  »ben voilà, tu es une personne qui cherche un peu d’attention n’est-ce pas? »….il ne m’a pas prise au sérieux du tout, et pourtant il y avait des signes évidents: j’étais très pâle, maigre et parlais lentement, je n’étais pas rentrée au travail le matin même, je ‘coulais’ tous mes cours ça n’allait pas bien à l’école, j’étais restée un long moment sur un lieu où je pensais ou planifiais faire une tentative de suicide, etc etc…. mes idées sombres étaient intenses et très lourdes, mais ce médecin ne m’avait pas pris au sérieux du tout..

  • À mon avis, ce serait plus constructif de faire pression auprès de notre bon système de santé qui donne le pouvoir absolue aux médecins. Ils n’ont pas toutes les sciences infuses. Pourquoi ne pourrions nous pas allez voir un psychothérapeute qui connais très bien la question ne pratiquant que dans ce domaine. Pourquoi ne pouvoir avoir de prescriptions et papiers nécessaires au repos d’un vrai professionnel en santé mentale. La pratique des médecins de famille se trouvent dans bien d’autres domaines que la santé mentale. Mais il existe tellement de bon psychothérapeutes et psychiatres qui ne sont pas accessibles à tous pour de vrais évaluations dans notre beau réseaux de la santé. Ce réseau de références sans fin avant d’avoir accès à un service spécialisé me désole. Bonne fin de journée à vous.

  • Il est maintenant facile de porter plainte au collège des médecins sur le site internet et cela vaut aussi pour tout professionnel de la santé qui n a pas su répondre à des besoins physiques et psychologiques nécessitant une aide à court ou moyen terme ou dont l attitude et le manque d empathie laissent croire que vos droits ont été brimés.

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