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J’ai perdu mon bébé mais ça ne vous enlève pas le droit de trouver la maternité difficile

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Je pense qu’il est le temps de mettre quelque chose au clair. La vie est injuste. C’est une salope, avec certaines personnes plus que d’autres. Je fais partie des personnes avec qui elle aime bien être bitch. Des fois, je broie du noir et je me demande pourquoi. Mais c’est comme ça, et s’apitoyer sur notre sort ou être jaloux des autres qui semblent l’avoir plus facile, c’est toxique. Tout comme dire aux autres comment se sentir.

Être maman, c’est difficile. On le sait. C’est demandant physiquement, mentalement et émotionnellement. Quand on décide d’avoir un enfant, on sait qu’il y aura des hauts et des bas, des moments magiques et difficiles. Mais est-ce que ça veut dire qu’il faut endurer les tourments en silence et se la fermer quand on est fatiguée? Qu’on n’aime pas nos enfants quand on boit un verre de vin quand ils sont couchés? Évidemment que non.

J’ai vécu le cauchemar de tous les parents. La maladie de mon enfant, son hospitalisation, les espoirs et les échecs, son décès. Mais avant, j’étais une maman normale. J’étais épuisée avec ma grande de trois ans et mon bébé, tannée de me battre pour les repas et les dodos et exaspérée que mon bébé se réveille dès que je le déposais, je soupirais quand mademoiselle voulait le verre mauve au lieu du jaune… Mais ça n’enlevait rien à mon amour pour eux, et je continuais de faire de mon mieux.

Aujourd’hui, ces moments sont devenus le bon temps, de beaux souvenirs d’une époque heureuse, bien qu’imparfaite. Malgré mes plaintes, j’aimais ma vie. Même si cette vie normale était beaucoup plus facile que ce que nous avons vécu après le diagnostic de cancer de mon garçon et le fardeau du deuil qui me suivra à jamais, ma fatigue et mon exaspération d’avant étaient bien valides! J’avais le droit de me sentir dépassée et de m’exprimer!

Je dois avouer que je roule parfois intérieurement les yeux quand les parents de bébés me disent qu’ils sont fatigués. Parce que j’ai passé huit mois à l’hôpital avec un bébé allaité, des pompes qui sonnaient sans cesse et des infirmières qui prenaient ses signes vitaux aux quatre heures et réveillaient mon bébé au sommeil beaucoup trop léger et incommodé par les effets secondaires de la chimio. Bref, j’ai pas dormi pendant huit mois. Malgré tout, qu’est-ce qui me donnerait le droit d’aller dire à ma belle-soeur d’arrêter de chialer avec ses deux bébés en santé? Est-ce que ça apporterait du positif de lui dire d’arrêter de se plaindre parce que les parents à l’hôpital ne dorment presque pas ou qu’il y a des enfants autistes qui ont le cancer? Absolument pas. Elle est épuisée et a le droit d’être à boutte. C’est une maman accomplie et elle est folle d’amour pour ses garçons quand même. Ceci étant, quand elle me dit qu’elle est fatiguée, je lui dis que c’est normal et que ça va aller en s’améliorant et je lui demande si je peux faire quelque chose pour l’aider.

Quand je vois mes amies mamans découragées que leurs enfants aient encore des mois de traitements de chimio devant eux ou qu’ils devront être hospitalisés pour la prochaine phase, je les trouve chanceuses. Je les envie. Si ça pouvait me ramener Alexis, je resterais à l’hôpital pour toujours. Mais est-ce que je vais aller leur dire d’arrêter de chialer? Ben non. Et mes amies qui ont perdu leur seul enfant après un terrible combat contre le cancer, est-ce qu’elles vont me dire d’arrêter de chialer quand je dis que ma fille ne me lâche pas parce qu’elle est traumatisée de notre séparation durant l’hospitalisation de son frère? Non plus. Est-ce que la maman qui m’a dit que ça serait plus grave si son adolescent mourrait que mon bébé, parce qu’Alexis était dans ma vie depuis moins longtemps que son fils, m’a apporté quelque chose de positif? Calvaire que non.

Chacune d’entre nous vit des défis particuliers. Il y a toujours pire, il y a toujours mieux. Ce n’est pas un concours de la plus fatiguée, de la plus occupée ou de la maman la plus à plaindre. Tout le monde est à boutte de temps en temps. Et ce n’est pas en comparant les malheurs des unes et des autres ou en disant aux mères à boutte d’arrêter de chialer qu’on va améliorer notre sort.

Tu trouves qu’une maman est à boutte pour rien et t’es juste à boutte des mères à boutte? Fais un commentaire constructif et respectueux pour l’aider. T’as rien de bon à dire? Continue ton chemin. Le négatif attire le négatif, et le positif attire le positif. Alors pourquoi ne pas simplement se soutenir les unes les autres?

Moi, j’ai choisi mon camp.

Crédit : Africa Studio/Shutterstock.com

Anne Boucher

Maman d’une grande fille et d’un petit garçon devenu un ange à l’âge de seize mois après un long combat contre la leucémie, je demeure de nature optimiste malgré une vie très corsée, je fais de mon mieux afin d’aider ma petite famille à remontrer la longue pente qui se trouve devant nous et retrouver un semblant de vie normale. J’ai décidé d’écrire pour évacuer le méchant, garder vivante la mémoire de mon petit champion Alexis et sensibiliser les autres à la réalité des parents d’enfants malades.

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