pregnant woman with friend hug

À mon amie nouvellement enceinte, de ton amie qui n’arrive pas à avoir d’enfant

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Je n’y arrive pas. J’aimerais tant, mais je n’y arrive pas. Tu sais, ta joie, ton immense bonheur d’être enceinte, ces émotions que tu veux partager avec moi, je ne peux pas, du moins pas cette fois. J’ai cette énorme boule dans le fond de ma gorge qui m’empêche de respirer. Je peine à retenir mes larmes. Je ne devrais peut-être pas, mais j’ai peur que tu comprennes que ce ne sont pas des larmes de joie. Tu es heureuse et je le vois, mais moi, je ne peux l’être pour toi, j’essaie, mais je n’y arrive pas.

Je ne peux pas te cacher ce profond vide qui m’habite. Encore moins avec ton annonce qui ne fait que le creuser davantage. Tes yeux s’illuminent quand tu en parles, moi, mon regard s’éteint quand je t’écoute. Ce n’est pas ta faute, j’aimerais que mes yeux reflètent l’éclat des tiens, j’aimerais tellement que mon regard soit le miroir de celui que tu m’offres avec tant d’amour, mais je ne peux pas, je n’y arrive pas.

J’essaie d’étouffer les cris de ma colère. Tu n’y es pour rien, c’est pas ta faute, mais j’ai tellement envie d’hurler. Ton annonce qui devait me remplir de joie ne fait que m’emplir de rage. Pendant que tu te réjouis de ton petit miracle et que tu l’exclames haut et fort, moi je ne peux que m’apitoyer sur mon sort, serrer les dents et gémir sur cette injustice… Je voudrais tellement briser ce silence, mais je ne peux pas, je n’y arrive pas.

J’aimerais tant te confier que plus cette vie grandit en toi, plus le poids de cette absence croît en moi. Tous ces instants de bonheur que tu veux me partager ne font que ranimer tous ces moments de douleur que je me dois de te cacher. J’ai peur, tu comprends? J’ai peur d’avoir plus mal que je ne l’ai déjà. J’ai peur de cette souffrance que la vie qui grandit en toi fait grandir en moi. Je voudrais tellement que cette souffrance diminue à mesure que celui ou celle qui est dans ton ventre grandit…je ne peux pas, je n’y arrive pas.

Je n’y arrive pas. Chaque fois que tu as mal au coeur le matin, c’est mon coeur qui a mal. Chaque mois qui te rapproche de ton bonheur, moi j’ai l’impression de m’éloigner du mien. Chaque petit coup de pied que tu ressens dans ton ventre a l’effet d’un coup de poing dans le mien. Pour chaque échographie qui t’apprend que ton petit va bien, moi je n’ai qu’une image floue dans ma tête qui panse mes souffrances de ce que pourrait avoir l’air le mien. Chaque fois que tu as peur de perdre celui que tu chéris, moi j’ai juste peur de ne jamais connaître le mien.

Tu sais, quand ton petit monde évolue autour de ta future vie, moi, pendant ce temps, le mien s’effrite peu à peu. Ton petit espoir qui s’épanouit au fond de toi alimente de plus en plus le désespoir qui s’installe en moi. Toi, qui deviens maman, j’ai besoin de recul. Tu connais tellement de beaux instants que je voudrais vivre avec toi, mais je n’y arrive pas. C’est viscéral, tu comprends. Chaque étape que tu franchiras me rappellera amèrement celles que je n’arrive pas à franchir. Cela peut te sembler égoïste de ma part, mais tu vois, je dois te l’avouer, ma peine me rend aveugle à ton bonheur. J’aimerais tant pouvoir être celle qui se réjouit de vivre ça avec toi, mais je ne peux pas, car toi qui m’annonces que tu seras maman, tu me rappelles que moi, je n’y arrive pas.

Crédit : Jacob Lund/Shutterstock.com

La Collaboratrice dans l'Ombre

La Collaboratrice dans l'Ombre est la couverture utilisée par toutes les collaboratrices de l'équipe qui souhaitent écrire des articles crus et criant d'une vérité sans filtre. Souhaitant exprimer et assumer leurs opinions sans pour autant blesser leur entourage immédiat, elles préfèrent alors utiliser le couvert de l'anonymat.

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1 Comment

  • Je suis désolée pour toi, je compatis et je comprends, vraiment… Mon conseil serait de te préserver en prenant un peu de recul pour te recentrer sur toi… J’ai évité les bébés durant un an et demi après ma fausse couche tardive, parce que je ne pouvais pas faire semblant d’aller bien, les rares fois où j’en ai croisé j’avais l’impression d’être insensible parce que j’avais tellement peur de m’effondrer devant tout le monde dans un moment qui devait être gai que j’ai inhibé mes émotions, mais ça demandait énormément d’énergie… Je suis un peu triste d’avoir peu vu le petit garçon de ma meilleure amie, mais maintenant que j’y arrive de nouveau je me suis rapprochée de lui et ma meilleure amie ne m’en a pas voulu de ne pas avoir cherché les contacts durant quelques temps… Je crois que tu dois faire les choses exactement comme tu les sens au fond de toi, ne te fais pas violence en permanence, écoute-toi. Aujourd’hui, ma situation n’est pas encore suffisamment stable pour réessayer, et je suis terrifiée à l’idée de ne pas pouvoir retomber enceinte, ou de perdre encore un bébé, alors avec une telle incertitude quant à mon avenir, les nouvelles de grossesse me rendent toujours profondément triste parce que je ne sais pas non plus si j’aurai la chance de le vivre aussi un jour… Il faut essayer de faire confiance à la vie, et ne pas louper les moments présents à cause de notre envie irrésistible de fonder une famille. J’aimerais tellement avoir la capacité de vivre au jour le jour, mais mon horloge biologique m’en empêche désormais, rares sont les moments où je suis pleinement heureuse, sans cette épée de Damoclès au-dessus de ma tête. Mais ça ne m’empêche pas d’essayer, parce que la vie est tout de même belle et que je suis entourée de personnes magnifiques que j’aime par dessus tout 🙂
    Je t’envoie plein de courage, prends soin de toi.

    Justine

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