little boy on mother's knees

Mes fils, vous n’irez pas à la guerre

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La vie m’a été clémente, vous êtes en santé, intelligents, bien élevés. La vie vous a été douce, vous n’avez jamais connu l’abondance, mais vous n’avez jamais manqué de rien et toujours mangé à votre faim.

J’ai passé les treize dernières années, malgré les obstacles et les épreuves, à me dire que la plus belle chose que j’ai faite, était mes enfants. Qu’il n’y a pas de plus grand bonheur que celui d’avoir donné la vie. Je n’ai jamais compris, qu’une mère, peu importe les circonstances dans lesquelles elle a enfanté, puisse regretter ce geste si merveilleux que de donner la vie, et l’aventure de la maternité qui s’ensuit.

Mais plus vous vieillissez, plus vous devenez autonomes, plus j’ai peur. Il m’arrive même de regretter d’avoir choisi d’avoir des enfants. Je regarde ces guerres, ces attentats, ce monde si cruel qui vous attend. Ce qu’on voit aux nouvelles n’est tellement pas rassurant. Et si on s’en allait en guerre?

J’ai peur.

Jamais je n’aurais mis d’enfants au monde si j’avais pensé un jour qu’il serait possible que vous soyez des enfants de la guerre. J’ai peur de devoir devenir cette maman de la guerre. J’ai peur de devoir vous expliquer pourquoi une personne qui nous est chère devra nous quitter pour aller se battre. Peur de devoir vous expliquer, à un certain point, pourquoi cette personne ne reviendra plus. J’ai peur d’être cette mère qui va voir la terreur dans vos yeux, quand vous comprendrez que le pays est en guerre. Je crains le jour où aller au parc ne serait plus possible sans être en danger. Peur de ne plus entendre vos rires aux éclats et vos excès de folie. Peur qu’on vous vole votre enfance.

Je panique quand je m’imagine en train de vous serrer tous les quatre contre moi, pendant que les bombes explosent. J’ai mal au cœur quand j’imagine vos petits yeux remplis de terreur. J’ai peur de n’avoir rien à vous offrir pour vous rassurer. J’ai peur qu’un jour, on vous arrache à moi pour aller défendre notre pays. J’ai peur de vous voir partir, parce que peu importe que vous reveniez ou pas, c’est vers l’enfer que vous vous en iriez. J’ai peur de recevoir la visite d’un haut dirigeant de l’armée qui m’annoncerait votre mort, mais je suis aussi effrayée à l’idée de vous voir revenir, car vous seriez brisés à jamais. J’ai peur de ces politiciens qui vont mettre vos têtes sur le billot pendant que leurs proches, eux, seront protégés. J’ai encore plus peur depuis que notre pays voisin, notre pays « ami » a élu un homme qui ne m’inspire absolument pas confiance pour l’avenir.

Sachez, mes chers fils, que je donnerai tout, même ma vie, pour que vous n’ayez pas à connaître la guerre. Je ne vous ai pas mis au monde pour que vous payiez ce prix. Je ne vous laisserai jamais vivre cette souffrance. Jamais je ne vous laisserai être obligés de tuer pour survivre. Je refuse. Personne ne devrait jamais avoir à vivre cela. Mais, si même ma vie ne suffisait pas, je ne vous laisserai pas partir. Si je dois vous couper les deux jambes, arracher vos yeux, vous tuer de mes propres mains, pour que vous n’ayez jamais à vivre cette horreur, je le ferai. Et s’il fallait que je faillisse, j’en mourrais.

Mais comprenez-le bien mes fils. Vous n’irez pas à la guerre.

Crédit : VGstockstudio/Shutterstock.com

Geneviève Groulx

Trente-cinq, reine de la désorganisation, j’ai pondu quatre garçons par amour pour la maternité, sans vraiment me poser de questions… Je vous confirme qu’on y survit, jusqu’à l’adolescence… après… y’a plus de garantie, ça dépend du nombre de litres de vin à votre disposition! Je suis mariée, je ne vis pas avec mon mari, on fait la garde partagée de nos enfants et on est amoureux. Moi, les standards, je m’en balance! Anxieuse chronique, la meilleure décision que j’ai prise dans ma vie, c’est d’accepter l’aide médicale à la folie! J’assume ce que je suis.

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