baby boy

Tu avais l’air d’une petite fille, qu’ils disaient

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Mon fils, laisse-moi te raconter une histoire sur ta binette.

Je savais que tu étais un petit garçon bien avant que la technicienne pointe tes foufounes sur l’écran. Instinct maternel ou intuition féminine ? Moi je dis que c’était tes coups de pied qui m’évoquaient des images de petit tannant. Bref, je n’ai pas attendu longtemps avant de faire aller ma carte de crédit (et celle de ton père) dans la déco, les vêtements et les accessoires bleus. Je clamais haut et fort le genre de mon bébé-en-construction.

Quand tu t’es enfin pointé le bout du nez, évidemment, tu étais le plus beau. J’étais fière.

Un jour, on s’est décidés à prendre l’air. On est sortis au centre d’achats et tu as rencontré les gens. Ah ! Les gens ! Je t’avoue qu’au début, c’était plaisant de se pavaner, toi et moi, mon bébé. Tel un souvenir de voyage collé sur un frigo, nous étions de vrais aimants à inconnus. Tous voulaient jeter un coup d’œil au précieux joyau caché dans ma poussette.

C’est là que ça a commencé. T’sais les commentaires….

« Ben il a l’air d’une petite fille ! »

Un monsieur m’a demandé ce que tu étais. J’ai répondu un petit garçon tout neuf. Ça aurait été facile à deviner. Ta poussette était bleue, ta tuque, ton manteau, ta suce, tout était bleu ! Il a quand même rétorqué que tu avais l’air d’une petite fille. Il est quoi lui, un spécialiste des faces de bébé ? J’ai fait un air bête souri. On est partis. J’ai encaissé cette première droite, mais ça a quand même fait un petit pli sur mon cœur de maman.

Mais on ne s’est pas privés de sortie juste à cause de ça.

On se faisait souvent dire que tu me ressemblais. C’est vrai qu’on était (et on est encore) un peu semblables, toi et moi. Pourtant, tu avais tellement des airs de ton paternel. Vous aviez (et avez encore) les mêmes yeux. Puis, un jour où on achetait des vêtements à papa (parce que maman, elle, attendait encore de perdre un petit cinq livres avant de se gâter), un monsieur s’est approché pour te faire coucou. Là encore, j’ai spécifié que tu étais un G.A.R.Ç.O.N.

Face de monsieur pas convaincu.

« Ah ouin ? Pourtant, il a tellement une belle peau ! »

Devais-je en déduire que ton chromosome Y avait mal fait son travail en ne te gratifiant PAS d’un épiderme de vieille pomme ratatinée ? Étrangement, j’en doute fort. Tout le monde rêve d’avoir une peau de bébé parce que c’est doux, rose et lisse, et le sexe n’a rien à voir là-dedans.

Je vais terminer mon histoire au moment où, quelques semaines plus tard à l’épicerie devant le rayon des surgelés, une madame faisait goûter des choses brunes. Encore une fois, soit ton kit bleu ne criait pas assez fort, soit elle portait des lunettes roses. Encore une fois, j’ai gardé le sourire quand elle m’a dit :

« Awww. Inquiétez-vous pas, le prochain ce sera une petite fille. »

Pouvez-vous répéter, j’ai mal entendu. Dans le sens que vous auriez préféré que je réponde fille ? Dans le sens que je devrais être un peu déçue que mon premier soit un garçon et allumer une couple de lampions pour le deuxième ?  

Je n’en pouvais plus. C’était comme si, en me regardant, moi, la petite blonde souriante, l’univers assumait que je n’allais engendrer que des bébés filles. Des mini-moi. Et même si c’était vrai que tes grands yeux bleus, tes trois quatre cheveux blonds et ton teint rosé semaient un peu la confusion, je pouvais lire une déception dans le regard des gens (parce que dans leurs commentaires, c’était assez clair merci). Une déception qui me faisait de la peine. J’étais tellement fière d’avoir un p’tit homme. Tu étais beau, sage, heureux. Pourquoi est-ce que les gens cherchaient à péter notre bulle ?

Aujourd’hui, avec du recul, je trouve ça très drôle. C’était peut-être les hormones de maman ours qui me faisaient réagir ainsi. Dans le fond, so what si t’avais l’air d’une fille ! À mes yeux, tu es et tu resteras toujours le plus beau garçon du monde. Et un jour, on regardera nos photos de bébé ensemble et on rira un bon coup de voir ta face de p’tite fille et, ironiquement, ma face de p’tit gars.

Ben oui, c’est maintenant que je te l’avoue mon fils. Moi, quand j’étais bébé, on m’habillait en bleu et j’avais l’air d’un p’tit gars. #JokePasJoke

Mlle B.
MLLE B.
Crédit : Angela Waye/Shutterstock.com

Mlle. B

En entrevue, je dis que mon plus grand défaut est d’être perfectionniste. Mais entre toi et moi, à part ma mise en plis, j’aime bien que les choses soient en désordre. Du café sur mon chandail; ben oui, je suis maladroite et je marche trop vite. Du linge et des jouets qui traînent; ça met de la vie dans ma maison. Des dossiers éparpillés sur mon bureau; la preuve que je travaille fort ! Bébé porte des vêtements dépareillés; ça le rend encore plus mignon. La perfection est subjective. Et pour moi, mes imperfections sont presque parfaites.

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2 Comments

  • Moi j’ai vécu le contraire. Mon bébé fille était grande et grosse. Je l’habillais en rose, je lui ai fait percé les oreilles, je lui mettais des boucles dans les cheveux… « C’est un garçon?? » Non mais… Maintenant c’est une belle grande fille, très féminine. Comme quoi…

  • Et oui, moi aussi j’ai vécu le contraire! Même aujourd’hui alors que ma fille va avoir 3 ans et pas beaucoup de cheveux. Les gens (surtout agés) voient ma fille et disent « Ha le beau p’tit gars »…. et moi qui ne leur répond plus et qui dit à ma fille « Vient ma cocotte ». Pourtant, elle a tellement un visage féminin, les oreilles percées, du linge de fille!!

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