maman mouche-bébé

La morve

maman mouche-bébé

Ça commence insidieusement. Un p’tit spot un peu luisant en dessous du nez de ton bébé tout neuf pis tout rose. Un p’tit coup de manche de chandail pis ça part. Mais trente minutes après, ça revient. Précieux se met à avoir les joues rouges pis à tousser. Pis c’est pire. Pis une heure après, ça épaissit, pis ça vire au jaune vert. Pis ça arrête pas de couler, ça fait des p’tites couronnes décoratives dans les narines de Précieux pis y’a des agglomérats verdâtres pis collants qui commencent à se solidifier tranquillement. Tu n’y échapperas pas, ça va être toi contre Madame Mooorrvveee…

Premier round, la douche nasale. Poupon ne se doute de rien, tout occupé à se beurrer la face au complet avec sa nouvelle substance corporelle dans laquelle se mêlent des rubans jaunes et verts, en plus des bulles. Faque tu te faufiles insidieusement derrière lui pis tu lui rentres le pouch-pouch dans le nez, avant d’appuyer fermement sur l’embout. Résultat ? Face à l’attentat à son intégrité, bébé hurle comme une corne de brume, les yeux exorbités pis les quatre membres en extension, la face rouge pis toujours barbouillée de morve, à laquelle se mêlent désormais une rivière de larmes pis de la bave. T’as beau avoir pris la version ultra-douce soin confort pour petits nez gros comme une pinotte, Précieux s’en fout comme de l’an quarante pis signale à grands cris l’indignité de sa figure maternelle qui détruit l’œuvre visqueuse produite par son petit corps.

Fait que c’est ben mal amanchée que tu te prépares à amorcer le round deux. T’sais, le fatidique mouche-bébé. Celui que tes amies t’ont donné à ton shower en se tapant sur les cuisses pis en riant. Sur le coup, tu t’es pas méfiée pis tu t’es vaguement demandé l’utilité de ce cossin-là. Sur la boîte, tu voyais bien que la madame avec son beau brushing des années 80 mettait un tuyau dans le nez de bébé, mais sur la photo, l’autre bout y était dans la main. C’t’en lisant les instructions, un peu nauséeuse, que tu comprends que l’autre bout, il va dans ta bouche. Tu vas devenir l’aspirateur à morve de ton bébé. Le vacuum à magma. La suceuse de pus. Tu peux pas croire que tu vas pouvoir mettre ça dans ton CV de maman, mais ç’a ben l’air que ça va devenir un passage obligé.

En tenant fermement le poupon sous ton bras (parce que tu te doutes que ça se passera pas ben ben mieux qu’au premier round), tu approches la poire du mouche-bébé de la source de la morve (aussi appelée le nez). Précieux hurle, se débat, te beurre encore plus de bave pis de morve, pis essaie de t’échapper comme un vampire devant un crucifix. Sentant ton courage faiblir, tu réussis néanmoins à force de contorsions à introduire le bout de la chose dans l’orifice approprié, pis tu fais la seule chose qu’une maman consciencieuse peut faire, tu aspires. En priant de tout ton cœur que la morve reste dans le fucking réservoir. Pis le bruit. Le bruit épouvantable, comme celui de l’aspirateur à bouche chez le dentiste, mais tu le sais bien que t’es dans ton salon, que c’est pas dans la bouche de ton bébé que t’as mis la poire pis que c’est pas de l’eau que tu aspires. Ça sonne gluant, ça sonne motton, ça sonne comme quelque chose qu’un être humain ne devrait pas produire. Après deux trois shots de succion dégeulasse pis un changement de narine, ça devient moins productif. Ton regard sur le réservoir te confirmera que ton sacrifice n’aura pas été vain. Y’est plein, pis y’est de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Le cœur sur le bord des lèvres, tu démanches la patente pour la laver pis la vider. Pis tu soupires de la satisfaction-du-devoir-accompli. T’es une bonne maman, tu l’as fait, t’as triomphé de Madame Morve.

Pis ton regard se tourne vers Précieux, maintenant tout calme et souriant. Pis sous son nez, recommence à couler une flaque un peu visqueuse…

Maman Au Cube
MAMAN AU CUBE
Crédit : vimeo.com

Maman Au Cube

Je suis une maman tout ce qu’il a de plus ordinaire, sauf que j’ai trois bébés du même âge. Ils sont parfaitement gros, parfaitement en santé, parfaitement plates, nommément #1, #2 et #3. Ça fait qu’à quatre, on n’entre pas pantoute dans le moule de la Maternité-parfaite, ni même dans celle de la maternité normale. Grande acerbe devant l’Éternel, chialeuse de compétition, critique perpétuelle, je n’aspire à rien d’autre qu’à faire comme tout le monde, sans jamais y arriver. Faut comprendre, le monde est fou !!!!

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