woman cry with computer

La promotion que tu as refusée parce que tu es maman

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T’es allée à l’entrevue avec pas trop d’attentes. Un peu pour te prouver que malgré les congés de maternité, t’étais pas trop rouillée. Tu as quand même pris la peine de te préparer le matin de l’entrevue. Tu es sortie de là en te disant que tu avais fait de ton mieux et que, comme tu le dis aux enfants, l’important c’est d’essayer.

Tu as reçu le téléphone sur ton heure de dîner. Tes collègues ont vu ta face changer : tu avais la job. Celle dont tu rêvais il y a quelques années. Celle pour laquelle tu as étudié. Celle qui vient avec plus de responsabilités, mais tellement de satisfaction.

Ton premier réflexe a été d’appeler tes parents. Après tout, ce sont eux qui t’ont encouragée pendant toutes tes années d’université. Ton père était ému au téléphone et tu étais sur le bord de brailler. Tu as texté ton chum qui t’a aussitôt appelée pour te dire qu’il allait aller chercher des sushis et du vin pour souper. Et, au passage, il t’a dit qu’il était fier de toi.

Tu as littéralement flotté tout l’après-midi. Puis tu es embarquée dans ton auto et tu t’es mise à mesurer l’impact de tous les changements à venir. Plus d’heures au bureau, moins à la maison. Déjà que tu courais à tous les soirs, que ton chum s’occupait du matin et que son horaire ne lui permettait pas de s’occuper du soir. Malgré ton bon vouloir, tu as réalisé que tes enfants risquaient de passer un bon dix heures à la garderie. Tous les jours. En comptant dans ta tête, tu as réalisé que tu allais passer trois heures par jour avec eux au maximum sans compter les soirs où tu allais devoir rester au bureau et où c’est ta mère qui devrait s’occuper des enfants en attendant que ton chum revienne.

Tu es arrivée à la garderie et tu as ramassé ta marmaille. Tu as regardé tes enfants et ton coeur s’est serré devant l’impression de ne pas les voir grandir qui t’a sauté en plein visage. Ton coeur s’est serré parce que ta tête t’a clairement fait comprendre ce que tu devais faire.

Tu es arrivée à la maison et comme tous les soirs, tu as couru pour que la routine souper dodo se fasse dans un délai raisonnable tout en sachant que dans peu de temps, les devoirs s’y ajouteraient.  En calculant l’heure à laquelle tu reviendrais à la maison et celle à laquelle la routine du soir prendrait fin si tu acceptais ce nouveau poste, ton coeur s’est serré plus fort.

Ton chum est arrivé juste à temps pour coucher les enfants. Tu as mangé tes sushis. Tu as fini ton vin. Tu as profité de ton moment tout en sachant que demain, tu allais rappeler pour dire que non, tu ne prendrais pas le poste. Que oui, tu aurais aimé ça, mais que non, ça ne marchera pas. Et quand on te demanderait pourquoi, tu te retiendrais pour ne pas dire « parce que j’ai des enfants ».

Ta dernière gorgée de vin avait un goût de sel et tu as réalisé qu’il provenait des larmes que tu refoulais depuis quatre heures.

Il y a des sacrifices qui laissent un goût plus salé que d’autres en bouche.

Crédit : fizkes/Shutterstock.com

Édith Deschambault

Vieille jeune maman de trente-huit ans, j'ai un charmant garçon de treize mois et j'en attends un deuxième qui devrait arriver sous peu. Pas en couple avec le papa, nous avons décidé de faire des bébés (ça devait être un, ce sera deux). Ayant été longtemps une maman parfaite (oui, je jugeais les repas, les activités et le ménage pas fait chez mes amies), la réalité me frappe en plein fouet et j'essaie tant bien que mal d'accepter que je suis, bien malgré moi, ordinaire.

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