man with boy

La revanche de papa : notre vie sans maman

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Ta maman nous a quittés tu avais à peine un an. Quelques jours seulement avant que tu fasses tes premiers pas. J’étais seul à crier dans la maison quand tu as mis bien maladroitement ton pied droit devant ton pied gauche. J’étais si fier, et si triste à la fois. Tu étais si fier, et si confus. Avec ton large sourire, tu cherchais en vain le regard de ta maman. Tu venais tout juste d’apprendre à dire son nom. Tu aurais voulu lui montrer comme tu es bon. Mon cœur s’est fendu en deux. Je me doutais bien que désormais je serais le seul témoin des grandes étapes de ta vie. Et qu’à chacune d’entre elles, tu regarderais au-dessus de mon épaule, au cas où ta maman serait là.

Nous avons dû réajuster le tir toi et moi. Je n’étais pas prêt à assumer l’entière responsabilité de la parentalité. Tu n’étais pas prêt à voir ta maman disparaître. Je perdais ma liberté financière, mon volley-ball le mardi soir, ma bière avec les boys. Tu perdais les doux bisous maternels, la compassion pour un genou éraflé, l’amour de celle qui t’a mis au monde. Tu étais bien plus perdant que moi.

Il arrive que les gens te demandent bien candidement où est ta maman. Tu te tournes alors vers moi, le regard interrogateur, sans trop savoir quoi répondre. Je te comprends. Je n’ai moi-même toujours pas trouvé une réponse convenable. Je fige un peu chaque fois, baragouinant un peu n’importe quoi. Mais ce n’est jamais très convaincant. Les yeux que tu fais dans ces moments-là m’ébranlent jusqu’au plus profond de moi-même. Je me sens si impuissant. Sauf que je ne laisse rien transparaître. Je tente rapidement de te changer les idées. Eh! Regarde, le gros chien! Il est beau, tu trouves pas? 

Je ne veux pas que les gens te définissent comme l’enfant abandonné par sa mère. Je ne veux pas que tu te définisses comme tel. Tu es bien plus que ça. Tu es un petit homme brillant, souriant, farceur et sensible. Tu es le plus gentil petit garçon du monde. Tu es aimé, pas seulement de ton papa, mais de tous ceux qui te côtoient.

Ceci dit, j’aimerais bien qu’un jour tu puisses avoir un modèle féminin à la maison. J’ai commencé tranquillement mes recherches. Je me suis même inscrit sur un site de rencontre. Mais sois patient stp. Le papa monoparental ne semble pas être très populaire dans les critères de recherche. Quant à moi, je trouve difficilement le courage pour faire les premiers pas. Je suis devenu plus sélectif. Je ne veux pas et ne peux pas te présenter n’importe qui. Je suis terrifié à l’idée de nous exposer une fois de plus à de grandes peines.

D’ici là, je profite du temps qu’on passe ensemble. Je suis content que nous nous soyons bien adaptés à notre nouvelle réalité. Nous formons maintenant une sacrée équipe. Je me sens privilégié de t’avoir à mes côtés. Si tu savais la fierté que j’ai quand tu me prends la main sur le trottoir. Je pourrais me promener en grosse Ferrari que je ne me sentirais pas plus riche.

Je dois achever ce petit mot, que je t’écris pendant ma seule journée de « congé ». Désolé de ne pas t’avoir gardé avec moi aujourd’hui, mais j’ai parfois un peu de misère à maintenir la maison en ordre et faire trois ou quatre brassées de suite. Je ne suis pas très multitasking, tu sais. D’où la nécessité un jour d’avoir une femme à la maison.

J’ai hâte d’aller te chercher à la garderie. Dans la voiture, je vois un petit dinosaure traîner sur la banquette arrière et une bouffée d’amour me submerge. Tu joues au ballon avec tes amis. Tu m’aperçois, tu cries un papa bien senti et tu cours me sauter dans les bras comme si je revenais d’Afghanistan. À chaque fois, c’est le meilleur moment de ma journée.

Je t’aime, mon garçon.

Crédit : Zynatis/Shutterstock.com

Charles

Je suis un papa moderne. Un papa monoparental. Un papa très impliqué dans la vie de son fils, dès le jour -200. Je revis mon enfance à travers mon petit garçon. J'en profite au maximum. Vu de l'extérieur, on peut penser que je suis en plein contrôle de mes moyens. En réalité, je suis envahi par le doute et la culpabilité de ne pas avoir pu offrir une famille unie à mon fils. Je fais parfois des erreurs, mais une chose demeure constante: je fais tout avec amour.

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2 Comments

  • Wow quel beau texte. J’espère que vous le garderez pour le faire lire à votre fils quand il aura l’âge de comprendre à quel point il y a de l’amour dans ces mots.

  • Vous avez une plume solide qui transpire l’amour fou. C’est tellement puissant que vos mots raisonnent dans mon coeur et m’arrachent quelques larmes. Votre garçon à un papa héros ! Merci d’être un si merveilleux papa.

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