man woman fight

Quand tu ne comprends rien, mon chéri

man woman fight

Je t’aime mon chéri, mais des fois tu ne comprends rien.

Je sais que tu m’aimes mon chéri, mais des fois tu ne comprends rien.

Je sais que bien souvent tu comprends mon chéri, mais des fois tu ne comprends franchement rien à rien.

Pis ces fois-là, tu me pousses à boutte.

Je sais que tu ne fais pas exprès.

Mais qu’est-ce qui se passe dans ta tête ces jours-là? Pourquoi tu passes de monsieur compréhensif à monsieur borné en quelques secondes? Pourquoi la connexion entre toi et moi disparaît momentanément?

Tu ne m’écoutes plus. Tu considères mes arguments comme non valides. Tu me tiens tête. Comme si avoir raison devenait soudainement plus important que notre relation en elle-même.

Ça me place bien souvent dans un état de crissitude avancé. Coudonc? Testes-tu les limites de mon humeur? Tu le sais pourtant que depuis que je suis mère de trois petits, mon sac à bonne humeur se vide plus vite qu’avant.

Pourquoi tu me parles de LA brassée que j’ai oublié de plier? Les huit cent soixante-quinze autres qui ont été rangées depuis longtemps dans tes tiroirs, m’en parles-tu? J’étais fatiguée. J’ai laissé faire le lavage en me disant que les voisins ne viendraient pas faire d’inspection demain sur le niveau de notre panier à linge. Je ne m’attendais pas à ce que ce soit toi qui me le remettes dans la face, mon chéri. Toi qui sais pourtant que j’ai des années de fatigue accumulée derrière la cravate.

Pourquoi paniques-tu à la vue des sandwichs – ou, horreur, des toasts- que j’ai préparés pour le souper un soir de semaine? Je sais que ce n’est pas de la fine cuisine. Je sais que ta faim d’homme qui a travaillé dur ne sera pas comblée complètement. Mais comme j’essaie de te l’expliquer, je suis brûlée de ma journée d’ouvrage moi aussi. Au bout de mon rouleau. Pourquoi ce soir tu ne le comprends pas? Pourquoi tu t’entêtes à me parler de légumes? Le frigo est juste devant toi si tu ne peux pas attendre à demain.

Pourquoi tu me picosses avec le fait que je ne joue presque plus avec mes enfants? Qu’est-ce que tu ne comprends pas au fait que j’aurais besoin d’au moins trente-six heures dans une journée pour réussir à faire juste la moitié des choses prévues à l’horaire? Entre la routine, les repas, la job à temps plein, les devoirs, les cours des enfants, les bains pis les crises, j’ai effectivement parfois de la difficulté à placer le temps de jouer par terre dans le salon avec eux. Mais toi, c’est quand la dernière fois que tu as joué avec eux?

Pis depuis quand tu ne saisis plus ce que je t’explique, mon chéri? Je parle pourtant encore la même langue que toi. Nous qui nous comprenons si bien d’habitude, que se passe-t-il?

Des fois, ça me rend foutument triste. Que tu ne me comprennes plus, moi et ma fatigue. Que tu ne me comprennes plus, moi et mes humeurs. Est-ce que tu m’écoutes seulement?

C’est là que j’ai eu comme une révélation. T’sais comme une ampoule qui s’est allumée au-dessus de ma tête.

Moi non plus, je ne te comprends plus. Moi non plus, je ne t’écoute plus.

Je suis tellement obnubilée par ma propre fatigue et par mes propres humeurs que j’en ai quasiment oublié les tiennes.

Je veux tellement que tu me comprennes. Je te le répète constamment. Mais tes besoins à toi, ils sont où?

Parce qu’un papa, ça peut être fatigué aussi. Ça a aussi le droit d’être à boutte de toute. C’est peut-être pour ça que tu ne me comprends plus. Tu ne te comprends plus toi-même, chéri. Toi qui as l’habitude d’être plus fort que tout le monde.

Ça fait qu’on est dus pour une bonne jasette, toi et moi. Pis surtout une bonne écoute. Prenons le temps avant que le temps nous rattrape.

Bon. Ça me fâche pareil quand tu ne comprends rien.

Mais je te donne la permission d’être fâché contre moi toi aussi. Parce que je ne suis pas mieux que toi, mon chéri.

Je t’aime. Mais des fois, moi non plus je ne comprends rien à rien.

Et je m’en excuse.

Crédit : Oneinchpunch/Shutterstock.com

Audrey Roy

Super-maman de trois enfants dans la trentaine avancée, directrice en chef de ma famille reconstituée (presque) parfaite, ma vie est une source inépuisable de délires familiaux à écrire. Étant une ex-abonnée de l'organisation extrême, le petit dernier m'aura appris que le lâcher-prise est une valeur sûre pour survivre à mon quotidien. Fière mère indigne, écrire est pour moi un véritable plaisir coupable. Au plaisir de vous faire sourire (et de vous faire sentir moins seules dans vos tourments).

Plus d'articles

Post navigation

2 Comments

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *